Notre adieu
C'était cette après-midi. Que nous étions tous réunis pour l'adieu.
Il y avait des milliers de fleurs, toutes des couleurs que tu aimais !
Des jaunes et roses pâles ! C'était magnifique ! Sur ton cercueil
j'avais posé cette photo qui vous unissait dans un même sourire, ta
fille et toi.
Aujourd'hui j'ai rencontré ta mère et ta soeur (elle
te ressemble tant...). J'ai pu mettre un visage sur elles, avec qui tu
n'as pas voulu faire la paix avant de partir. J'ai rencontré leur
douleur. J'ai pris dans mes bras leur chagrin si violent. De plein
fouet, tu sais.
J'ai menti, encore et encore, tentant de leur
apporter cet amour que tu leur avais refusé. Ai mis sur le dos de ta
maladie ce que tu avais en toi de refus d'elles. Car tu es partie en
leur refusant ton adieu. Et elles ne se le pardonnent pas. Que tu ais
refusé leur pardon. Oui, elles ont mal, si mal. Alors il me fallait
mentir.
Je sais, moi, combien tu étais lucide pourtant en le
refusant. Je le sais bien. Nous en avions parlé. Cela me blessait que
tu aimes ton Dieu plus que leur amour. C'était une guerre de religions
que vous meniez. Vous ne pouviez parler de ce même Dieu dans l'amour.
Mais pourquoi ? Pourquoi n'en étiez-vous pas capable ? Moi je n'y crois
pas à votre Dieu, vous le savez bien, je ne crois qu'en l'homme.
Et en l'amour de l'autre. Alors je n'ai pas peur de mentir, par amour.
Je
sais, moi, que tu t'es battue dans tes dernières heures contre elles.
J'étais là. Et je n'oublierai jamais. Tu
souffrais de ce pardon que tu refusais d'offrir.
Je leur ai menti,
tu sais. Je leur ai parlé de ces derniers instants, de ton "sourire aux
anges" quand tu as laissé le dernier souffle s'échapper. Elles en ont
été si heureuses. De te penser en paix. Toi qui ne l'étais pas.
Je m'en veux de ne pas t'avoir donné la
force d'accepter le pardon. Alors maintenant je ne m'en veux pas de
mentir. Qu'elles aient en elles le mot de "maladie" à la place du mot
"refus".
Les prêtres (oui, ils étaient trois, ton Dieu avait beaucoup d'importance pour toi, ils sont venus)
m'ont fait lire une poésie, ils acceptaient que mes mots ne soient pas
les mêmes que les leurs. Ils m'ont montré que l'amour était leur vie.
Et quand cette chanson
a résonné dans l'église... Je craignais un peu leurs réactions, cela
change des requiem ! mais c'était pour elle, pour sa fille, nous en
avions déjà parlé. Elle voulait que je la chante ! Déjà qu'il est
difficile de l'écouter sans pleurer ! alors la chanter ! Non ! J'ai
tenu ma fille dans mes bras. Le papa a tenu sa petite orpheline dans
ses bras. Et nous avons enfin pu tous pleurer un bon coup. Et les
prêtres ont noté les références du Cd. C'était ma prière à moi, cette
chanson, ils l'ont entendue...et ils ont compris qu'elle parlait d'un
amour des hommes qui doit parfois être proche du leur.
J'avais besoin d'écrire tout cela. Besoin de dire que la paix vient de nous.