Corps à corps
Une histoire des sens
L’odeur l’emplit. De cette fragance douce, la mousse éclaboussée d’eau du torrent. Le bruit rebondissait sur chaque rocher, en notes humides, en notes glacées. Elle fermait les yeux, un collier de brume se posait sur ses épaules, un voile se déchirait sur sa peau. La main glissa sur le rocher, caressait les lichens rugueux. Le pied roulait sur les cailloux, scandait des éboulis légers. Elle se sentait genièvre aux fines épines, au parfum piquant. Elle était cette fleur de mûrier sauvage, délicats pétales inaccessibles aux mains fragiles. La limace noire glissait sur son bras ; elle aimait cette mollesse à la salive qui éclatait en bulles gluantes. Les tendons s’allongeaient au rythme de ses pas, les fibres longues des muscles la caressaient dans ses jambes tendues. Elle marchait, elle grimpait. Comme un corps familier, les sentiers lui dévoilaient ses odeurs, ses contours, ses fragilités secrètes, ses gémissements. Corps à corps sans gagnant ni perdant, mêlant plaisir du corps et paix du cœur.