En fracas sans odeur
La mer était aussi vivante que l'Océan. Avec le vrai fracas des vagues. Sans le parfum d'iode que j'aime tant, sans le sel qui se cristallise sur les lèvres. Deux jours, le nez au vent. Le long du port de Cap d'Agde, le long du canal de Sète. Deux jours, pour faire un bilan. Mais si, je le savais bien que j'allais y dresser un bilan. De ce que je ne veux plus. Je me suis posée sur les rochers noirs où les coquillages s'accrochent. J'ai laissé le sable couler dans les espaces de mon poing qui se dé-serrait. Des éclats de coquillages se collaient aux dessins de vie de mes paumes. J'ai jeté en fermant les yeux, violemment, les galets les plus lourds. Mes hontes percutaient l'eau et se noyaient. Et je n'ai versé aucune larme. J'étais là, coquillage muet, huître rugueuse, en mouvements si lents. Comme cette eau irisée et lourde qui danse le long des coques. Je suis partie vers Sète, vers ses falaises, les pins parasols. J'ai tracé dans le sable, le long d'une plage si longue, d'un bois flotté, mes désirs secrets.
Du haut de Sète, j'ai croisé du regard un pin parasol, tout en haut de la colline, et je l'ai entendu chanter, le moustachu, je vous assure. C'est là qu'il a plaqué son dernier accord de guitare. J'ai rêvé de Brassens et de sa supplique, de ses mots si fous et doux, d'être aimée, l'espace d'une averse, sous un coin de parapluie. Puis je me suis envolée.