Descends de ton nuage
C'est trop tard, tu ne peux plus te cacher, déguisée en papillon, en
courant d'air bleu. La ptite a su te retrouver, elle sait bien où tu te
caches ! Ah là là, les enfants, ils ont le coeur en double-vue. Ce pont au-dessus de sa mère morte...
cette parole de Linda Lemay, quand elle a résonné dans l'église, le 17
septembre, ces mots ont du être la première pierre de l'ouvrage.
Je
te l'avoue, ptit papillon bleu, la semaine dernière nous avions
rendez-vous, elle et moi. Et je la vois sortir du parking. Elle, mais
elle-femme.
Oui, la métamorphose a eu lieu. Poupée matriochka qui porte le germe
d'une nouvelle vie en elle, ta fille est devenue femme. Son visage a
changé, tu sais. Non pas à cause de la douce rondeur des joues, non,
c'est le regard. Plus profond, plus ample. Comme si elle regardait
demain avec la certitude qu'elle devait accueuillir ce jour à venir.
C'est un drôle de changement, et j'éprouve de la difficulté à te
l'écrire, ptit papillon bleu. Comment te parler d'elle que tu as
quittée
avec tant de tristesse. Et d'elle, qui t'a laissée enfin t'envoler de
ton corps fatigué. Vous vous êtes offert en dernier partage votre vie à
vivre. Parce que je te sais, oui, moi qui suis si terre-à-terre, je te
sais, en âme. Je n'ai pas ta croyance, mais je respecte tant la tienne,
que ton sourire lors de ton dernier souffle m'a dit que tu avais une
âme.
Ptit'femme s'est assise avec moi, au restaurant. Elle avait un
regard en secret à avouer. L'hôpital a daté le jour de la naissance de
l'enfant. Tu sais bien qu'il faut une date, pour tous les papiers, ici
le monde est toujours en filigrane de calendrier.
Voyons, neuf mois...
et bien cela nous amène au 17 septembre 2006.
Oui, le jour de notre adieu.
Alors
ce n'est pas la peine que tu penses être bien cachée dans ton nuage,
ptit papillon bleu ! Elle sait bien que le fil de la vie tisse de bien
jolies t-issu.