Peur ?
Etait-ce de la peur ? Ce sentiment là ? Non, elle devait se tromper !
Pourtant, ce serrement de la gorge, cet étouffement soudain... Peut-être de la stupeur, de la colère, de la rage ? Pas de la peur quand même ! Elle tenta de faire dire ce "non" que sa raison attendait, mais tout s'emmêlait comme bobine au sol. Plus elle tirait sur le fil plus la bobine filait au loin, aussi légère que bille de polystyrène. Elle devait se tromper. Comment pouvait-elle en avoir peur ? C'était impossible...
Elle ne se trompait pas en réalité. Elle l'avait en mémoire dans ses tripes. Quand son regard était devenu comme fou. Quand il avait saisi son bras avec une force qui l'avait laissée soumise. Elle avait alors senti son ventre se contracter, se tordre. Anéantie par la stu-peur. S'était adossée au mur. Avait attendu. Non, il ne l'avait pas frappée. S'était nourri de sa peur. Animale. Elle, comme un chien doit sentir son échine se courber dans l'attente des coups du maître qu'il aime.
Mais là, maintenant, était-ce encore de la peur ? Ce pouvoir sur elle ? Peur de quoi ? Elle laissait la question tourner en boucle stupide. Peur de ne s'être jamais trompée, peut-être. D'avoir toujours su que cet instinct qui l'avait guidée, que cette force étrange disait vrai. Elle avait donc écrit ces mots là avec raison ? Cela ne la faisait plus sourire. Elle savait ; elle avait ressenti de la peur, tout à l'heure.
Comme avant.
Relut les mots de ses peurs anciennes. Avec la nausée au bord des yeux.
(...) Ses yeux, ceux du félin tapi dans l’ombre et qui se nourrit de la peur de sa proie (...)
(...) Je suis fière de n’avoir pas attendu, animal apeuré, d’être sa proie pour toujours (...)
(...) J'ai pleuré un diable qui me menaçait de l'enfer.(...)
(...) elle a entendu la menace derrière cette douceur exquise. Il sourit d'avoir fui du labyrinthe de l'arène. Juste à tant.(...)
(...) Ce grain de sable aux arêtes microscopiques mais anguleuses me raye la paix. Grain de peur. Pourquoi germe-t-il là ? Est-ce réminiscence de mon cerveau reptilien ? Ne suis-je donc pas capable de me raisonner ? Mais enfin, pourquoi ressentir ce sentiment là ? Qui me fait reculer, tenter de me protéger de ...mais de quoi ? Je n'aime pas avoir peur de l'autre, sans en comprendre la raison. (...)
La colère prit peu à peu la place en elle.
La colère froide et radicale.
La colère juste.
Oui, juste.