Les plus belles ailes, pour elle
Papillon bleu, j'ai un service à te demander. Non, pas pour moi
personnellement, tu sais bien que nulle ombre ne plane sur nous. Quant
à ta ptite, elle resplendit de devenir maman, tu le vois bien !
Non, ce service là, seule toi peux le réaliser.
Vois-tu, là-bas,
de l'autre côté de l'Océan, dans ce pays où les gens parlent
français avec un accent qui nous enchante, là-bas, où la neige recouvre
encore tout, quelqu'un a besoin de toi. Elle me l'a dit.
"S'il-te-plaît,
Mouette, pourrais tu t'assurer que si maman s'envole, elle ait au moins les plus belles ailes ? "
Oui, c'est du chagrin d'écrire cela. Du qui laisse le coeur en vrac. Alors moi, qui suis si loin, je pense aux ailes pour elle.
Des ailes qui seraient juste comme il faut. Assez fortes pour déchirer
le cocon de la vie, quand l'heure est venue, et se déployer dans un
bruissement léger. Comme ce soupir si doux qui a accompagné ta dernière
seconde, avant que tu ne t'envoles en papillon bleu. Dis, tu veux bien
aller là-bas ? Tu te poses près d'elle, et, doucement, à son oreille, tu lui dis comment ne pas avoir peur de ce beau voyage.
Tu sais, V. Hugo a écrit quelques chose de très beau. Je pensais à toi en le lisant.
"L'ombre était nuptiale, auguste et solennelle ;
Les anges volaient sans doute obscurément,
Car on voyait passer dans la nuit, par moment,
Quelque chose de bleu qui paraissait une aile."
Maintenant, je pense à eux, qui sont dans la douleur. Elle ne savait pas, avant, qu'être impuissante fait si mal.
Je lui dirai les mots bleus
qui sont comme un ciel heureux.
Je lui dirai les mots gris
qui sont épais de la pluie.
Et
toi, petit papillon bleu, va l'aider à tisser les plus belles des
ailes, à cette maman qui va quitter ses enfants. Elle doit avoir du
chagrin de les laisser. Dis lui comment tu es là, dans notre coeur,
comment tu portes ta ptite de tes ailes si fines.
Je te remercie, tu sais, et je t'embrasse tout doux, tout doux.