Défi n° 16) _ Cualli Tonalli _
Cualli -qui n'a pas de blog-, et n'est pas un troll malicieux, me confia ce défi ;
"(...) je te soumets ce petit défi en deux étapes préliminaires à l'amitié :
D’abord, il faut ouvrir son cœur tout grand et lire les trois phrases qui suivent, c'est important :
1) Cualli n'est absolument pas un troll.
2) C'est juste un homme, batailleur s’il le faut, drôle quand il peut… au cœur sensible, toujours… parfait, jamais.
3)
Cualli ami de Mouette également, bien sûr, de toutes les mouettes, de
tous les gens de la terre, de la musique et de la poésie qui sauvent
tout. Je pense que les trolls existent, effectivement... en fait ce
serait des gens comme nous si leurs motivations profondes hélas, ne les
conduisaient pas toujours à détruire tout.
La deuxième étape :
Tu dois te définir en trois phrases, telle qu’en toi-même tu te perçois…"
Elle
était là, comme un poisson éventré proprement. Nettoyée des déchets. De
ses mains gantées le Docteur Mouette sortit la masse de la cage
thoracique. Juste quelques centimètres, pour y travailler plus à son
aise. Cela le faisait toujours rire, ce petit cœur qui bougeait comme
un pois sauteur, de ceux que l’on jardinait, grâce à Pif gadget.
Maintenant il cultivait dans ses mains gantées le cœur des autres.
Un
troll de plus à sa collection ! Oui, un troll, c’est ainsi qu’il
appelait les cœurs ! Mais il évitait de le dire à l’équipe du bloc, ils
le prendrait pour un fou. Il ne l’était pas, il trouvait juste de la
poésie dans les organes. Le peau-ète chirurgien s'était pris d'amitié pour les coeurs cachés de ses frères humains. .
L’opération était
toujours très longue, il travaillait mécaniquement, laissait les
pensées le distraire de la pression. Artérielle. Il parlait au troll,
lui racontait son origine. Tiens, celui là s’appellerait Cualli !
Sais-tu Cualli, que tu fus symbole des forces de la Nature ? Comme un
Titan ! Oh, pas un Titan très solide en ce moment, mais quelle force,
quand même ! D’ailleurs, c’est la première chose que l’on entend dans
le ventre de la mère. Le cœur ! Rapide et vif, brave soldat batailleur,
mais prêt à jouer des tours aussi ! Quand il est amoureux,
surtout ! Cualli, tu es un troll, mais tu ne fais plus peur à personne…
tu es même devenu "drôle" en français !
Mais oui, ptit ami,
raccroche-toi à ça au lieu de te boucher les artères de ta vie. Tu ne vas quand
même pas te taire ? Tiens, je te raconte l’histoire des trolls des
villes, d’accord ? Ce sont les gargouilles ! trolls urbains qui
vivent avec les gouttières, canalisant l'eau par leurs oreilles et la
rejetant par la bouche, qu'elles ne peuvent pas fermer. Donc, tu ne
fermes pas tes artères, s’il te plaît. Je veux t’entendre encore. Tu es
drôle, et fort ! Et le siège des passions, pour beaucoup ! D’ailleurs
tu joues des tours étranges à ceux qui te croient centre de l’amour.
Sais-tu que cela existe vraiment, un chagrin d’amour qui brise le cœur
? Mais oui ! Le coeur se fracture. On en meurt parfois, je l'ai vu.
Non, ne rigole pas, tiens toi tranquille, je suis en train de te fabriquer une jolie déviation, tes soubresauts me gênent.
Si
tu savais combien j’en ai croisé des trolls ! Tous avec quelque chose
de guingois, comme toi. A part dans les bouquins je n’en ai jamais vu
de parfait. Jamais ! Et toujours tout nus. L’érotisme du cœur-troll
serait d’être en pyjama ! A rayures. Pfffft ! Il faut que j’arrête de
rire, ça fait glisser mon masque.
Bon, je t’explique quand même ce
que je viens de te faire, Cualli ! Écoute moi bien. J’ai pris les deux
cornes bouchées que tu avais en haut de ta tête et je les ai raccordées
à la queue que tu as plus bas. On appelle ça un pontage. Double. Les
cornes et la queue... tu comprends mieux pourquoi tu es un troll ?
Voilà, le sang circule. Écoute la musique qui gargouille en toi !
Écoute bien, elle te sauve. Elle est la vie.
Quand tu seras las de
battre trop mécaniquement, pense à cette seconde là, où les graves ont fait
résonner - et raisonner je l'espère - ton âme étriquée. Mais oui,
tu as une âme, pourquoi non ?
N’oublie jamais. La poésie - même
trollesque -, la musique - même en cadence régulière - , et la terre
- qui te porte. Cela te sauvera de l’asphyxie. Ceux qui l’oublient
détruisent tout. Tout, car ils tuent la seule chose qui soit vraie.
La vie, tout simplement.
Allez Cualli, je te re-dépose, bonne route à toi.
Le docteur Mouette enleva ses gants. Son masque. Dans la salle où il se lavait il se regarda dans la glace.
Une simple mouette... comme il aurait aimé être cet oiseau là !
Pour sa liberté de jouir du vent. Lui qui était si raisonnable.
Pour sa liberté de changer de nid au gré de sa vie. Lui qui était si responsable.
Le docteur Mouette ferma les yeux pour mieux se voir.
Il aurait aimé être Docteur Mouette Rieuse, Troll Mouette Rieuse.
Lui qui se racontait des histoires que nul n’entendait. Il aurait aimé les vivre.
Et franchir de ses ailes grises le Mur de Pan aux légendes à créer.