Un sourire ? Un petit ?
C'est tellement facile de faire pleuvoir l'émotion. D'émouvoir.
Tellement facile. Le rire, ou même le simple sourire, avez-vous
remarqué comme les mots ne s'y prêtent guère ? Ou alors, le plus
souvent, accompagnés. Comme dans les bandes dessinées. Seul Gaston
Lagaffe a réussi à m'arracher des éclats de rire, par exemple. Et j'ai
connu certains s'étouffant en lisant "Zazie dans le métro" (pas moi, je n'aime pas !).
J'avoue un faible pour "Le petit Nicolas" qui a bercé mon enfance, j'en
ri encore ! Mais comme il est difficile de donner de la joie par
quelques écrits ! Attention, je ne parle pas du bonheur de lire, non,
seulement des sourires, comme "autour d'un café ", avec des amis.
Je
tente l'exercice parfois, en me défoulant avec une saine envie de me
moquer, y compris de moi, bien sûr. Pourquoi est-ce donc matière rare ?
La question me tracasse, me turlupine.
Pourtant je souris souvent
au cours de mes journées, mais écrire cette émotion... impossible. Elle
est passée par un regard, une voix, des gestes, mimiques, exclamations.
Tout ce que je ne sais déposer en lettres sur clavier.
Tenez,
comment vous décrire ma mine contrite, ce matin ? Mine de l'angelot qui
a transformé un nuage en passoire en jouant au jokari dessus. Parce
qu'il y a plein de moments où être contrit est indispensable. Ce matin,
il me fallait trouver la mine adéquate, celle qui ferait sourire et
entraînerait le pardon attendu (avec force contritions de ma part). Je devais rendre à son propriétaire un livre qui avait fait une grasse matinée imposante (très)
sur ma table de chevet. Et oui, j'avais oublié de le rendre, persuadée
bien entendu que cela était impossible...Imaginez donc ma main tendant
le livre oublié, dépassant de la salle de la cafétéria. Que la main, et
le livre au bout... Imaginez la tête des passants du couloir.
Effrayante main tendue, accrochée au livre, main dans le vide,
attendant la propriétaire conviée à partager un gobelet en guise de
pardon... Bon, j'ai été pardonnée, mais vous n'avez pas le sourire ;
normal, vous n'étiez pas là ! Je ne sais pas, moi, fermez les yeux,
imaginez, tentez le sourire... Non ? C'est bien ce que j'écrivais plus
haut... pas facile... pas facile du tout...
Ou alors - mais encore
eût-il fallu que y assistiez ! - ma discussion en éclats de rire avec
Guiseppe, notre nouveau stagiaire. Devinez d'où il vient ? Je sais,
j'ai trop de chance... avec son accent qui me... waouh... qui... Oui,
d'Italie !!! Alors j'en ai profité bien sûr. Il a du me parler en
italien, que je ne comprends toujours pas (mais c'est un jeune homme bien élevé, je suis sûre qu'il n'a rien dit de mal). Puis nous avons été obligés d'aborder
le sujet du Tiramitsu. Oui, parfaitement, o-bli-gés. A cause d'Arcadia.
Qui doit m'en faire un pour ma visite en février. Elle veut des
biscuits Pavescini.. Et lui, sa mama les fait avec d'autres, dont j'ai
oublié le nom....
Ma qué se n'est pas grrravé, ze vais à Noël en Italie, ze t'en ramènerrrai....Des deux marques, que tou vois la différrence...
Oh,
je vais craquer avant qu'il n'ait fini son stage ! Je me sens même
capable d'aller cantiner pour qu'il continue à me parler avec son
acccent diabolique !
Bon, ai-je réussi à vous faire sourire ? Un peu ? Une once microscopique de chouïa de petit sourire ?